Les dynamiques du clientélisme à Marseille : entre gouvernance locale et hégémonie politique

Marseille, deuxième plus grande ville de France, est souvent décrite comme un microcosme de la complexité politique urbaine. La ville a longtemps été un terrain fertile pour le clientélisme, une pratique où des politiciens accordent des faveurs en échange de soutien électoral. Cette dynamique a non seulement façonné le paysage politique local, mais a également contribué à l’hégémonie de certaines figures et partis politiques au fil des décennies.

Historique du clientélisme à Marseille

Depuis le milieu du XXe siècle, le clientélisme a joué un rôle central dans la politique marseillaise. Des figures emblématiques comme Gaston Defferre, maire de 1953 à 1986, ont utilisé ces pratiques pour consolider leur pouvoir. En s’appuyant sur des réseaux de relations personnelles et de services rendus, Defferre a réussi à instaurer une forme de stabilité politique, bien que souvent critiquée pour ses méthodes opaques.

Mécanismes du clientélisme urbain

Les mécanismes du clientélisme à Marseille sont variés et bien intégrés dans le tissu social de la ville. Ils incluent :

  • Attributions de logements sociaux : les politiciens peuvent influencer l’attribution de logements sociaux pour gagner le soutien des électeurs.
  • Subventions aux associations : en finançant des associations locales, les élus s’assurent de la loyauté de leurs dirigeants et membres.
  • Emplois municipaux : offrir des emplois dans la fonction publique locale en échange de soutien politique est une pratique courante.

Hégémonie politique et ses conséquences

Cette forme de gouvernement a permis à certains partis et individus de maintenir une hégémonie politique, souvent en dépit de critiques sur la transparence et l’équité. L’hégémonie politique à Marseille a plusieurs conséquences :

  • Renforcement des inégalités : les ressources et les opportunités ne sont pas toujours distribuées équitablement, favorisant ceux qui sont politiquement connectés.
  • Dépendance des citoyens : les habitants peuvent devenir dépendants de ces réseaux de patronage pour accéder aux services et opportunités, ce qui peut freiner l’initiative personnelle et l’engagement civique indépendant.
  • Érosion de la confiance publique : les pratiques clientélistes peuvent éroder la confiance des citoyens dans le système politique, renforçant le cynisme et l’abstention électorale.

Tentatives de réforme

Malgré la persistance du clientélisme, il y a eu des tentatives de réforme pour promouvoir une gouvernance plus transparente et équitable. Des initiatives pour renforcer la transparence, améliorer la participation citoyenne et garantir une distribution plus équitable des ressources ont été mises en place, bien que leurs succès soient variables.

Ressources le clientélisme urbain à Marseille

La Provence : Un article intitulé “Les dessous du clientélisme marseillais à travers les âges” par Denis Trossero explore les pratiques clientélistes à Marseille, en détaillant comment des figures politiques locales ont utilisé ces méthodes pour consolider leur pouvoir. L’article met en lumière les interactions historiques entre les politiciens et les résidents, ainsi que l’impact de ces pratiques sur la gouvernance locale​ (La Provence)​.

Livres

  • Clientélismes urbains par Cesare Mattina : Ce livre propose, au-delà du folklore de la « marseillologie », une vision à la fois précise et distanciée d’une des manières de gouverner une ville. Attribuer un emploi public, un logement social, un permis de construire, des places en crèche ou un simple titre honorifique est une prérogative des collectivités locales. Loin d’être anodines, ces redistributions de biens publics, matériels ou symboliques, à des individus, des familles, des groupes religieux, des personnalités sont une des modalités du gouvernement de la ville. À partir de l’exemple de Marseille, Cesare Mattina montre comment, dans une ville souvent qualifiée de corrompue, le clientélisme urbain a essentiellement profité aux classes moyennes et petites/moyennes en ascension sociale. Depuis les années Defferre, il a permis aux mêmes groupes sociaux et professionnels, choisis, voire construits — employés des collectivités locales, élites associatives communautaires et de quartier, notables des professions libérales, etc. —, de constituer un « bloc social historique », pour reprendre les termes d’Antonio Gramsci (Cairn).
  • Sociologie de Marseille par Claire Duport, Michel Peraldi et Michel Samson : Cet ouvrage, publié par La Découverte, fait partie d’une série de publications récentes qui s’intéressent aux dynamiques sociales et politiques de Marseille. Il fournit un cadre sociologique pour comprendre les interactions entre les différentes classes sociales et les institutions politiques dans la ville​ (OpenEdition Journals)​.

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