Que pensez-vous du report de la nomination du gouvernement à mi-août ?

Emmanuel Macron évacue l’hypothèse Lucie Castets

Après 15 jours de tractations, les partis de gauche sont finalement tombés d’accord sur la haute-fonctionnaire Lucie Castets. Son nom a été annoncé dans un communiqué ce mardi soir, quelques minutes seulement avant la première intervention télévisée d’Emmanuel Macron depuis le second tour des législatives.

Cependant, Emmanuel Macron a surpris en évacuant l’hypothèse Lucie Castets et en annonçant qu’il ne nommerait pas de gouvernement avant la mi-août.

Fin de non-recevoir immédiate du président de la République.

« Il est faux de dire que le Nouveau Front populaire aurait une majorité, quelle qu’elle soit »

« La question n’est pas un nom. La question, c’est quelle majorité peut se dégager à l’Assemblée »

Cette décision laisse planer l’incertitude et suscite de nombreuses interrogations sur l’orientation politique et les choix stratégiques du président pour la suite de son mandat.  Celui-ci, pourtant, peut désigner le premier ministre à sa convenance puisqu’aucun article constitutionnel n’oblige Emmanuel Macron à choisir un premier ministre issu des rangs de l’alliance des gauches. Cette prérogative lui appartient de plein droit via l’article 8 de la Constitution : «Le Président de la République nomme le premier ministre. Il met fin à ses fonctions sur la présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement».

Mettre le chef de l’Etat sous pression.

Deux petites heures avant l’interview qu’Emmanuel Macron a accordée mardi soir à France Télévisions et Radio France, le Nouveau Front populaire a (enfin) dégainé une candidature commune pour Matignon.

Qui est Lucie Castets ?

Il s’agit de Lucie Castets, 37 ans, une haute fonctionnaire à la mairie de Paris inconnue du grand public mais bien connue par ceux qui s’intéressent à la défense des services publics, une cause qui rassemble largement à gauche. Figure de proue du collectif Nos services publics, diplômée de Sciences-Po et de la London School of Economics, cette énarque passée par la direction générale du Trésor avant de rejoindre Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy, affiche un CV en béton armé. Et si elle n’est pas une élue de la République, ce qu’on lui reprochera, Lucie Castets a réussi l’exploit de faire consensus au sein du Nouveau Front populaire, ce qui est déjà une sacrée prouesse au regard des épisodes Huguette Bello puis Laurence Tubiana.

Elle s’est fait remarquer lors d’un débat télévisé sur l’affaire McKinsey

Lucie Castets s’est fait remarquer en novembre 2022 lors de sa participation à l’émission “C ce soir” sur France 5, intitulée “McKinsey : l’État sous influence?”. Ce débat télévisé portait sur le rôle des cabinets de conseil, notamment McKinsey, dans les affaires publiques françaises, et abordait des questions de transparence et d’influence politique. Castets, en tant que co-porte-parole du collectif “Nos services publics” et administratrice de l’État, y a critiqué le recours excessif aux consultants privés par l’administration publique, soulignant les risques pour la transparence et l’efficacité des services publics.

Bras de fer

Le NFP compte 182 élus répartis entre les écologistes, les communistes, les socialistes et les Insoumis.

L’annonce du NFP est intervenue seulement quelques minutes avant l’interview du chef de l’État, la première depuis les élections législatives qui ont secoué le pays.

Les chefs de partis de la coalition de gauche, qui a obtenu une majorité relative à l’Assemblée nationale, se sont étranglés sur X. « Le Président refuse le résultat de l’élection et veut nous imposer de force son nouveau Front républicain et nous obliger à renoncer à notre programme pour faire une alliance avec lui. Il n’en est pas question », a taclé le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon.

Comme lui, le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a dénoncé : « E. Macron tente un détournement coupable. Quand on convoque des élections au risque du chaos, on en respecte le résultat. Le déni est la pire des politiques. Celle qui conduit à la politique du pire. »

« Il faut qu’Emmanuel Macron sorte du déni. Nous avons gagné, nous avons un programme, nous avons une Première ministre. Nos électeur•trices attendent maintenant la mise en œuvre de nos mesures de justice sociale et de justice environnementale, qu’ils ont réclamées. Le Président ne peut y faire obstacle comme ça », renchérit la patronne des Verts Marine Tondelier.

Le sénateur et porte-parole du Parti communiste Ian Brossat a pointé le « déni » et le « mépris » du chef de l’État. « Finalement, la seule chose que Macron n’aura pas dissoute, c’est lui-même », a-t-il ajouté, toujours sur X. Même mot utilisé par le coordinateur de LFI Manuel Bompard, qui dénonce aussi le « déni de démocratie insupportable » du président qui refuse « d’appeler le Nouveau Front Populaire à constituer un gouvernement ».

« Ce soir, Macron refuse de nommer le Nouveau Front populaire et Lucie Castets à la tête du gouvernement. Il efface le résultat du scrutin et le vote de millions de Français qui ont placé le Nouveau Front Populaire en tête. Le coup de force antidémocratique doit être arrêté ! », a de son côté écrit l’eurodéputée insoumise Manon Aubry.

Réactions à cette candidature

Cette infographie a fait l’objet d’une note de la communauté X

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Interview France Inter – 24/04/24

Retranscription

Elle a accordé sa première interview à France Inter, où elle a critiqué le président Emmanuel Macron pour avoir rejeté sa candidature. Elle a souligné que le rejet des élections par le président constitue un déni de démocratie, particulièrement dans un contexte où les Français se sont mobilisés contre le Rassemblement National.

Castets a réitéré que le résultat des élections reflète un rejet de la politique actuelle et une demande de changement radical, avec un accent sur les services publics, le pouvoir d’achat, la justice fiscale et l’écologie. Elle a déclaré que le Nouveau Front Populaire est prêt à gouverner et demande au président de la nommer Première ministre. Elle a aussi précisé qu’il n’y aurait pas de coalition avec le camp présidentiel actuel en raison de divergences profondes.

Sur les priorités du NFP, Castets a mentionné l’abrogation de la réforme des retraites et la revalorisation des salaires. Elle a souligné la nécessité de renforcer les services publics, citant la crise de recrutement dans l’éducation comme un exemple clé. En matière de justice fiscale, elle a évoqué la lutte contre la fraude fiscale et la révision des politiques fiscales pour une contribution plus équitable des plus riches.

Lucie Castets a également défendu son bilan en tant que directrice des finances de Paris, malgré les critiques sur l’endettement de la ville. Elle a insisté sur le financement de projets écologiques et l’impact des politiques gouvernementales sur les finances locales. Enfin, elle a affirmé que le NFP continuerait à faire pression sur le président pour respecter les résultats des urnes et concrétiser l’espoir suscité par leur programme.

Echange avec les auditeurs

Question de Daniel : “Bonjour, je vous entends, mais en même temps je suis un peu surpris. Il est clair que vous n’avez pas la majorité si vous êtes désignée, donc vous ne pouvez pas être désignée s’il n’y a pas d’accord avec d’autres. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez faire un accord texte par texte plutôt qu’un accord qui contiendrait l’essentiel du programme du Front populaire, mais qui serait le résultat d’une concession, comme cela se fait dans tous les pays d’Europe. Est-ce qu’on peut arriver à discuter sur des bases ? Je pense clairement que c’est ce que les électeurs ont demandé et en tout cas, c’est ce que je demande, je suis un électeur de gauche.”

Réponse de Lucie Castets : “Alors déjà, je ne suis pas du tout en opposition avec ce que vous venez de dire, Daniel. La question est très pertinente. Mais je pense l’avoir dit, notre base de départ, c’est le programme du Nouveau Front Populaire. Ensuite, si des députés, si des personnalités politiques, mais aussi des personnalités de la société civile souhaitent nous rejoindre sur la base de ce programme, donc en accord avec ce programme, nous serons évidemment constructifs et on acceptera ça. En revanche, il y a des désaccords politiques profonds entre notre programme et celui de la majorité présidentielle actuelle, et donc il ne me semble pas possible de faire ce type d’accord s’ils ne souhaitent pas venir vers nous.”

Question de Santiago : “Bonjour, j’espère que vous serez bientôt nommée Première ministre. C’est complètement délirant que Macron appelle des élections anticipées juste avant les Jeux Olympiques, puis dit ‘non, mais attendez, on fait trêve olympique’. Bref, si vous êtes nommée Première ministre, par quoi commencez-vous dans le programme et surtout, comment mettez-vous en œuvre telle ou telle mesure ? Utilisez-vous les décrets ? Soumettez-vous au vote à l’Assemblée pour trouver des majorités au cas par cas ? Est-ce que des textes passés par le 49.3 peuvent être annulés aussi par le 49.3 ?”

Réponse de Lucie Castets : “Alors, nos premières priorités sont vraiment d’acter un changement de cap programmatique pour la France. Parmi ces premières priorités, il y a l’abrogation de la réforme des retraites, car c’est une réforme injuste. Sur la méthode, nous sommes encore en train de travailler dessus précisément sur l’abrogation de la réforme des retraites. La priorité, c’est d’abord d’abroger le texte, et ensuite il faudra donner la main aux partenaires sociaux, notamment pour une conférence de financement pour savoir comment on financera l’abrogation de la retraite à 64 ans. Il faudra aussi remettre certains sujets sur la table, notamment la pénibilité du travail et les petites retraites, et cela doit passer par des discussions avec les forces vives et les partenaires sociaux. Ensuite, il y a la revalorisation des salaires dans leur ensemble pour qu’on puisse vivre correctement de son travail, cela comprend le SMIC, mais aussi le point d’indice des fonctionnaires.”

Question de Lisa : “Bonjour, Lucie Castets. Vous luttez contre la criminalité financière et pour la restauration des services publics comme Première ministre. C’est un immense espoir. On a eu une suppression de 75 000 lits d’hôpitaux en 16 ans, 17 000 depuis 2017. Macron a supprimé 4 000 emplois de contrôleurs fiscaux. Chaque contrôleur redresse 10 firmes par an et rapporte des dizaines de fois son salaire. Que pouvez-vous faire face aux 80 milliards d’évasion fiscale et 120 milliards de corruption selon Anticorps ? Et pour rappel, 300 économistes, dont Thomas Piketty et Gabriel Zucman, disent que le programme économique du Front populaire est le meilleur.”

Réponse de Lucie Castets : “Merci pour cette question qui me tient beaucoup à cœur. Vous touchez là un élément central de la vie en collectivité : la fraude fiscale des particuliers et des grandes sociétés sont des phénomènes d’ampleur. En France, on n’a pas de calcul précis de ces phénomènes, mais on estime que la fraude pour les particuliers se situe entre 7 et 27 milliards d’euros, et pour les grandes entreprises, environ 25 milliards d’euros. Ce sont des montants massifs. Vous avez très bien souligné que les effectifs ont été réduits en matière de lutte contre la fraude fiscale. Il faut se fixer un objectif politique clair qui est de lutter pour faire revenir des recettes dans les caisses de l’État, mais aussi parce qu’il s’agit d’un enjeu de justice sociale et fiscale. Il est fondamental de montrer aux gens que l’on lutte efficacement contre ces phénomènes.”

Question de Catherine via l’application de France Inter : “Qu’est-ce que vous ferez si le président continue de refuser votre candidature ?”

Réponse de Lucie Castets : “Nous continuerons à mettre la pression sur le président pour qu’il tienne compte du verdict des urnes. Nous comptons aussi sur la société pour nous aider à pousser cet élan. Un espoir est né, il faut maintenant le concrétiser.”

Pour le débat

Nous vous invitons à débattre sur le récent refus par Emmanuel Macron de la candidature de Lucie Castets et le report de la nomination du gouvernement à mi-août. Pour que ce débat soit constructif et respectueux, nous vous demandons de suivre quelques règles simples :

  1. Respect et courtoisie : Veuillez vous exprimer de manière respectueuse envers les autres participants. Les insultes, attaques personnelles et propos discriminatoires ne seront pas tolérés.
  2. Argumentation : Présentez vos arguments de manière claire et structurée. N’hésitez pas à citer des sources fiables pour appuyer vos propos.
  3. Ouverture d’esprit : Soyez ouverts aux opinions des autres, même si elles diffèrent des vôtres. Le but du débat est d’échanger des idées et d’apprendre les uns des autres.

Pour participer au débat, vous pouvez simplement indiquer votre prénom et votre adresse email. Alternativement, vous pouvez ouvrir un compte sur fpres.org en utilisant votre compte Google.

Nous espérons que ce débat sera enrichissant pour tous et nous nous réjouissons de lire vos contributions.

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Julien
24 juillet 2024 07:59

La position de Macron est scandaleuse !

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