On s’interroge souvent sur le lien entre certains réseaux sociaux et l’obscurantisme de la pensée. Comment se fait-il que des influenceurs puissent exercer un tel charisme morbide, notamment sur X, et être suivis aveuglément par tant de personnes égarées, se transformant en véritables moutons noirs ? Plusieurs d’entre nous, en tant qu’apprentis journalistes citoyens, ne maîtrisent pas les outils informatiques et les réseaux sociaux. Pour cette raison, nous ne pouvons éclairer cette question que par le prisme de la littérature.
Dans cet article, je souhaite explorer ce lien en comparant la propagation de l’obscurantisme à travers l’histoire, du Malleus Maleficarum au rôle moderne des réseaux sociaux.
Partie 1 : Le Malleus Maleficarum et l’obscurantisme du passé
Le contexte historique
Dans son essai Le Complexe de la sorcière, Isabelle Sorente s’interroge sur les raisons pour lesquelles l’explosion des persécutions et des exécutions de masse de celles que l’on appelait “sorcières” a eu lieu en Europe, principalement au XVIe et surtout au XVIIe siècle, en pleine Inquisition, et non en plein Moyen Âge.
Le Malleus Maleficarum, ou “Marteau des sorcières”, est un texte emblématique de cette période. Ce livre, qui prétendait révéler les dangers des prétendues sorcières, affirmait que le monde était menacé par un complot de femmes ayant pactisé avec le diable. Elles seraient capables d’empêcher l’acte génital masculin, de manger des enfants, et de les offrir à des démons qui les sodomiseraient. Ce contenu grotesque a pourtant trouvé un écho dans une Europe en pleine transformation.
La peur et le contrôle social
Comment un livre aussi absurde a-t-il pu devenir un best-seller de son temps ? La réponse réside dans la peur. L’obscurantisme s’ancre souvent dans la peur, exploitée par ceux qui cherchent à contrôler la société. Les sorcières étaient des boucs émissaires faciles, tout comme les victimes des théories complotistes actuelles. Le Malleus Maleficarum a prospéré grâce à l’imprimerie, qui, tout en diffusant la pensée des Lumières, a également permis la propagation rapide des idées les plus sombres et irrationnelles.
Partie 2 : Les réseaux sociaux comme vecteurs d’obscurantisme
L’explosion des réseaux sociaux
De la même manière que l’imprimerie a diffusé le Malleus Maleficarum, nos réseaux sociaux modernes, qui nous apportent tant de connaissances, charrient aussi des flots d’obscénités. L’explosion des réseaux sociaux a permis la propagation rapide d’idées toxiques, exploitant les mêmes peurs et superstitions que celles qui ont alimenté la chasse aux sorcières.
Comment des personnes censées être réfléchies ont-elles pu croire, ne serait-ce qu’un instant, que des professeurs d’école apprenaient aux enfants à se masturber lors de cours préparatoires sur le genre ? Ce type de rumeurs, comme tant d’autres, trouve un terrain fertile sur les plateformes sociales, où les passions tristes et morbides sont exacerbées.
Les passions tristes et morbides
Freud évoquait le conflit entre Eros et Thanatos, les pulsions de vie et de mort, pour expliquer les dynamiques psychiques humaines. Les réseaux sociaux, avec leur capacité à amplifier les émotions négatives, semblent être particulièrement propices à la diffusion d’idées destructrices. Les fausses informations et les théories complotistes s’ancrent dans ces “passions tristes”, nourrissant l’obscurantisme moderne.
Partie 3 : Comment résister à l’obscurantisme
L’irrationalité humaine
Un des membres de notre boucle WhatsApp soulignait à juste titre que l’être humain n’était pas rationnel et que l’on ne pouvait pas combattre les forces obscures uniquement par la raison. Cette réalité rend la lutte contre les idées obscurantistes particulièrement difficile. Face à la montée de ces idées sur les réseaux sociaux, il est essentiel de reconnaître cette part d’irrationalité humaine.
L’importance de l’éducation et de la vigilance
La meilleure arme contre l’obscurantisme reste l’éducation et la vigilance. Nous devons promouvoir l’esprit critique et encourager une réflexion éclairée. En période de crise, lorsque les passions tristes semblent prendre le dessus, il faut se rappeler que la lumière de la raison et de la connaissance est notre meilleur allié pour résister aux ténèbres.